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Pour une république souveraine laïque et sociale

Pourquoi NRS ?

Pourquoi Nation & République Sociale ?

Avec la venue au pouvoir d’Emmanuel Macron, en mai 2017, l’état de dissolution de notre pays, la France, a atteint un moment critique : les forces qui ont organisé la vie politique depuis des décennies tendent à disparaître. Le problème n’est plus celui d’un changement de forme : même le clivage entre la droite et la gauche souffre sous les coups que lui assène le nouveau pouvoir. En réalité, cette mutation ne doit rien au talent d’un homme ou à une configuration politique particulière : elle résulte de l’entrée de la France dans une ère autant postpolitique que postnationale que, pas à pas, les tenants d’une fédéralisation de l’Europe ont mis au point depuis les années 1950.

La victoire d’Emmanuel Macron est cependant une victoire en trompe l’œil. Elle résulte plus de la faiblesse de ses adversaires que de ses propres mérites. Elle représente le sursaut ultime d’une élite déconnectée du peuple depuis longtemps qui tente de maintenir son hégémonie et ses privilèges. Les alternatives proposées, telles qu’elles sont organisées aujourd’hui ne peuvent conduire qu’à des impasses.

La France insoumise, malgré la campagne remarquable de Jean-Luc Mélenchon et le retour salutaire du drapeau français dans les meetings, présente trop d’ambiguïtés sur la question laïque pour rassembler le peuple contre l’actuelle élite dirigeante ; et son alliance parlementaire avec une faction communautariste est problématique …. Par ailleurs, sur le plan économique, la politique très ambitieuse que Jean-Luc Mélenchon désire mettre en œuvre ne va pas de soi : il s’agit de réduire le temps de travail et de satisfaire nombre de besoins sociaux négligés, tout en rompant avec l’Union monétaire (car jamais l’Allemagne n’admettra les conditions du « plan A » de la France Insoumise !). Cette rupture est, certes, nécessaire : il n’est pas de politique économique rationnelle et d’ambition sociale authentique pouvant être menées dans le cadre de l’Union Européenne. Mais, c’est bien la question du rythme des changements qui doit être débattue. Jean-Luc Mélenchon a, toutefois, le mérite de débattre de questions qui demeuraient interdites.

Le Front national de son côté, qui avait pour unique avantage de porter le débat sur la question de l’Euro a désormais abandonné cette question cruciale pour en revenir à ses marqueurs originaux : identité, sécurité, immigration.  Or il n’y a d’identité durable sans préservation de la souveraineté. Les Indiens d’Amérique ont une identité, mais ils n’exercent plus depuis longtemps de souveraineté sur leur territoire ! Précisons d’emblée que l’identité défendue par NRS n’est évidemment pas l’identité des « identitaires » religieux ou raciaux de toute espèce qui prolifèrent en ce moment : il s’agit de l’identité au sens d’Orwell, c’est-à-dire la perpétuation (non de l’éternité) d’un être collectif en mouvement perpétuel qui s’identifie mystiquement.

La création de NRS prend acte que la victoire d’Emmanuel Macron appelle une recomposition profonde de la vie politique. Ce dernier a su rassembler une grande partie de l’oligopole politique (de droite comme de gauche) et tous les tenants d’une intégration européenne plus affirmée. En face, les souverainistes sont affaiblis et divisés, porteurs d’une faible crédibilité. Nous devons relever le défi de la crédibilité du camp souverainiste et nous adresser au plus grand nombre. Il n’y aura pas d’alternatives, ni d’une union des droites, qui considèrent que les ordonnances sur la loi travail ne vont pas assez loin, ni dans une refondation de la gauche ayant pour boussole l’avenir radieux promis par le revenu universel ou le partage du travail. Bref, il faut en finir avec ce que Henri Guaino nommait l’ « économie du sacrifice » sans sombrer dans une logique économique déconnectée du réel et des valeurs du monde ouvrier, fondées sur un travail bien fait et justement rémunéré.

Tous ceux qui revendiquent pour la nation française le droit à l’existence et, pour ses citoyens, un droit imprescriptible à l’égale liberté, tous ceux-ci, donc, soutiennent le droit de la France à défendre la forme républicaine de son gouvernement, c’est-à-dire la démocratie forte conforme à son histoire, et à promouvoir la souveraineté nationale, c’est-à-dire le principe même de la puissance nécessaire à l’État républicain pour que vive la Nation. Il ne peut y avoir de souveraineté si la Nation n’a pas les moyens d’exercer le pouvoir de coordination de ses parties constitutives, si elle est privée du pouvoir de décréter les normes ordinaires de la vie publique et l’état d’exception : c’est cela que nous devons recouvrer et réinventer pour que persiste le peuple français qui s’est donné la nation républicaine comme forme de son organisation démocratique.

L’alternative souverainiste suppose de bien identifier les enjeux de l’heure. La France vit actuellement une triple insécurité :

– économique et sociale

– culturelle

– sécuritaire (liée à la montée du terrorisme et au retour de la guerre).

Sur la question du travail,  la baisse du coût du travail ou  la baisse de la durée du travail constituent à l’évidence des réponses convenues et inadéquates. NRS entend défendre la valorisation du travail et renouer avec la notion de juste prix pour défendre partout le professionnalisme des « gens de métiers » et rompre ainsi avec la « gouvernance par les nombres » (selon l’expression d’Alain Supiot). À l’évidence, il y a un lien étroit entre la souffrance des aides-soignantes du Jura et leur longue grève et la démission du général de Villiers. Partout on constate le règne de l’abstraction des chiffres, le mépris du réel, la dégradation des conditions de travail pour les militaires comme le personnel hospitalier. Le « souverainisme social » que certains, comme Jacques Sapir, ont commencé à conceptualiser, suppose d’aider nos compatriotes à faire le lien entre l’expérience vécue sur le lieu de travail- stress, souffrances, burn out – et les contraintes générées par notre perte de souveraineté dans tous les domaines. L’issue pour les couches populaires n’est pas dans la surenchère ou dans la désignation de l’étranger comme bouc-émissaire. Elle suppose de mieux articuler la question sociale et la question nationale. On le verra bientôt, lorsque les conséquences de l’ouverture à la concurrence se manifesteront concrètement à la SNCF ou lorsque les barrages hydrauliques seront concédés à d’autres entreprises qu’EDF. Les artisans et les PME voient tous les jours les dégâts provoqués par la directive sur les travailleurs détachés qu’Emmanuel Macron s’était engagé à réformer et qu’il n’a pas sérieusement mise en cause.

La lutte contre l’insécurité culturelle  nécessite une volonté politique réaffirmée sur ce que nous sommes. Il va de soi que l’organisation réellement démocratique du peuple présuppose que celui-ci soit libéré des tutelles religieuses qui s’octroient le droit de décider de la vie bonne. La République est certes une forme juridique, mais elle est aussi une catégorie de l’imaginaire et un contenu en terme de vertu. Sa neutralité a conduit à son affaiblissement. Le vivre-ensemble n’est qu’une donnée empirique et ne saurait devenir une fin en soi. Il convient de violenter celui-ci pour construire une Nation de citoyens soucieux les uns des autres, vertueux au sens civique. Comme l’écrit PJ Salazar, la «République est une forme forte de la politique, une violence même faite au vivre-ensemble». La séparation des cultes avec l’État reste donc une exigence majeure de notre républicanisme, à une heure où le réveil de la religiosité permet à certains de s’instituer en chefs de communautés ethnico-religieuses (pensons notamment au recul du droit des femmes dans l’espace public). Or, il ne peut y avoir de république, de cosouverains exerçant leurs droits et leurs devoirs, si la moitié de l’humanité est asservie ou assignée à résidence identitaire. Plus généralement, il ne peut y avoir de nation si le communautarisme et un esprit politico-religieux tentent de créer des peuples au sein du territoire national.

La lutte contre le terrorisme et la conduite de la guerre suppose que la France retrouve une parole libre et contribue à une politique d’équilibre, fidèle en cela à sa tradition. Il faut s’orienter vers un Système euro-méditerranéen reposant sur l’établissement d’un traité de paix et de solidarité absolue entre ses nations constitutives, de l’Atlantique à l’Oural. Une fois les limites précises fixées de ce système (borné par les mondes africains, turcs et chinois), des politiques actives de coopération intergouvernementale seront mises en œuvre impliquant une reconfiguration totale des systèmes monétaires et financiers, lesquelles deviendront des instruments au service des sociétés et non leur maîtres, comme c’est le cas aujourd’hui. Certes, promouvoir la souveraineté nationale, c’est affronter des forces nombreuses et diverses, qu’elles soient économiques, politiques et idéologiques, qui se sont données pour but de dissoudre les souverainetés nationales et les peuples d’Europe dont l’existence même est un obstacle à la construction d’une société européenne de marché. Mais le Brexit montre qu’il n’y a rien d’inéluctable pour peu qu’on le veuille : ce qu’a fait une politique néolibérale, une autre politique de république sociale peut le défaire.

NRS se donne comme objectif d’œuvrer à la mise en œuvre de l’idéal des républiques librement associées dans le cadre qui vient d’être défini. Il importe toutefois de préciser ce qu’implique la doctrine républicaine qui a été évoquée : une démocratie forte inscrite dans une histoire, tournée toute entière vers l’émancipation collective et individuelle qui sont en relation réciproque. C’est pourquoi, tant que subsisteront des injustices dans le régime républicain que nous défendons, la République elle-même se doit d’être révolutionnaire, se doit d’abolir ce qui rend possible ces injustices pour construire sans cesse de l’inédit. L’idée de justice, dont il est question ici, ne renvoie donc pas simplement à des pures considérations formelles de légalité mais à la prise en compte de l’homme réel. C’est pourquoi la République ne peut être que sociale, sauf à être le paravent d’une ploutocratie maquillée en « gouvernement représentatif » où certains sont plus égaux que d’autres, où les citoyens ne sont pas en fait des cosouverains. Il ne peut y avoir de citoyens libres dans une communauté où la puissance et la richesse de quelques-uns corrompent les lois et la politique en faveur de leurs intérêts particuliers.

Richesse et prospérité ne sont que des outils au service du bien commun : l’inégalité de fait ne peut donc être acceptée si elle attente à la liberté de tous et l’exigence de la vie bonne. Notre République ne peut plus reposer sur l’invocation magique de valeurs devenues des mots-valises. Il s’agit de faire d’individus et de groupes une communauté nationale. La République n’est pas pour nous un simple cadre juridique : elle est une forme puissante de politique basée sur les vertus politiques nous liant les uns aux autres et nous rendant cosouverains et responsables les uns des autres, ce que nous nommons compatriotisme.

C’est pourquoi il est nécessaire que l’autonomie maximale des individus soit assurée dans le domaine de la production et de l’échange des richesses sociales : l’économie fait partie de la chose publique. L’idéal des républiques s’associant librement est donc lié, pour nous, à l’idéal des travailleurs librement associés. A la différence du socialisme des origines, il ne s’agit pas d’en finir avec le salariat ou la propriété privée mais de les insérer dans l’objectif de l’État social qui donne à tous les hommes réels les moyens de leur dignité et de leur liberté. Le but de la République sociale est d’aboutir à une production qui repose sur une coopération entre égaux où prime la méritocratie et non pas le capital.

Le but de la République sociale est donc de combiner les diverses formes de propriétés (privée, associative et nationale) afin que la production devienne une coopération entre égaux. Où la hiérarchie ne s’impose pas pour des raisons de chance ou d’héritage, mais du fait de la seule raison de l’efficacité que doit atteindre le travail social. En bref, la cause du travail est la cause de la France, et la cause de la France est la cause du travail.

Une chose peut toutefois diviser les républicains souverainistes, ceux qui prennent l’idée de démocratie et de liberté des peuple au sérieux : la question de la nature. Le républicanisme des Anciens est frugal, car s’adonner à la quête de l’argent et des utilités, c’est se détourner de la vie civique. Et ce sont les tyrans qui encouragent la recherche du luxe chez leurs sujets. Cette leçon est actuelle : les régimes tyranniques contemporains n’ont que faire de l’homme libre et lui préfèrent la croissance économique, le luxe disait-on autrefois, cela, à tout prix, au prix donc de la dévastation de la nature. Or, la richesse n’est qu’un moyen de la vie bonne ; parfois même, elle peut l’empêcher si elle implique de nier la dignité de nos semblables et de disposer de ressources qui n’appartiennent qu’à ceux qui nous survivrons. Tout cela doit être pensé collectivement et décidé politiquement.

Au progressisme, NRS préfère donc le « méliorisme » : il nous faut chercher le meilleur et non pas s’étourdir dans une marche perpétuelle en avant et sans but. La question des formes souhaitables d’approvisionnement en énergie pour rendre pérenne notre vie se pose dans ces conditions. Si l’abandon du nucléaire devait entraîner une crise majeure pour satisfaire les idéologies nihilistes qu’abrite parfois une mauvaise écologie politique, il doit être refusée. Mais, la question du nucléaire comme des autres industries polluantes doit néanmoins être posée du point de vue d’un nouvel industrialisme au service du bien vivre et de l’indépendance nationale.

Notre républicanisme implique, par conséquent, la laïcité, l’État social, le féminisme, l’internationalisme et un rapport raisonné avec la nature.