facebook twitter Contact Forum

Pour une république souveraine laïque et sociale

La nation à l’épreuve du communautarisme

Par Faouzia Gariel-Menouni, le 4 octobre 2018

J’ai eu le plaisir d’assister le 22 septembre 2018 à la Sorbonne au lancement de Nation & République Sociale et d’écouter l’exposé de Gil Delannoi auteur du livre  La nation contre le nationalisme, une question d’actualité, au regard de la montée inquiétante des périls. J’aimerais développer un point particulier relatif à un aspect des problèmes propre à notre monde travaillé par la mondialisation libérale : nous assistons depuis une trentaine d’années à des revendications identitaires d’ordre ethnico-confessionnel porteuses du risque d’une atomisation culturelle. La nation ne serait plus alors ce lieu du vivre ensemble autour d’un projet commun de société, mais un ensemble d’individualités sans lien social autre que celui du marché global.  C’est ici que se pose la question de l’islamisme.

Sous sa forme conquérante, l’islamisme est une idéologie née en 1928 en Egypte contre la domination coloniale et les valeurs occidentales. Il a survécu après les indépendances et connaît une expansion notable depuis les années quatre-vingt, sous la férule des pays du Golfe, en particulier le Qatar et l’Arabie Saoudite, les grands argentiers des prédicateurs et des associations islamiques dans le monde. Ils ont acheté le silence de nos dirigeants contre les contrats d’armement et les pétrodollars  investis sur le territoire national, particulièrement par le Qatar (1).

L’islamisme français est incarné aujourd’hui par un certain nombre d’associations très actives (le CCIF, Lallab (une association « féministe », frériste), les  Musulmans de France (ex UOIF), Étudiants Musulmans de France etc..), qui encouragent l’exaltation de l’identité musulmane à travers la visibilité dans l’espace public d’un style vestimentaire repérable, les normes « hallal »(2) en matière de consommation (alimentaire, style vestimentaire, cosmétiques, finance, médicaments, tourisme et loisirs).  Par ailleurs, ils invitent les fidèles à ne pas se « soumettre » au mode de vie « décadent » des Occidentaux …

Il y a là clairement un appel au séparatisme qui s’apparente à un apartheid d’un genre nouveau, apartheid à la fois désiré et instrumentalisé pour dénoncer les discriminations rassemblées sous le concept valise d’ « islamophobie », dont le CCIF s’est fait l’affairiste par son jihad judiciaire. Ces associations, longtemps soutenues par le Qatar, sont désormais sous l’influence croissante de la Turquie d’Erdogan. Osons dire les choses : les réseaux fréristes ont fait leur entrisme dans nos institutions avec pour objectif l’acceptation du voile dans les établissements scolaires et le monde du travail, et tous les accoutrements « islamiques ». (3) (4)

Le rapport El Karoui de l’Institut Montaigne, relatif à l’organisation de l’Islam de France, a été sévèrement attaqué par le CCIF, qui a organisé une consultation auprès de 24000 personnes, et dont il ressort que l’écrasante majorité rejette l’ingérence de l’État français dans l’organisation du culte musulman, qui doit rester une affaire interne aux musulmans. Cet argument a été invoqué par Marwan Mohammed (4) au nom de la laïcité ! Mais il ne faut pas se tromper, sa rhétorique use d’un vocabulaire qui nous est familier, mais dans un sens différent. La laïcité est invoquée seulement quand il s’agit de la séparation de l’État et des Églises, mais nullement lorsqu’il faut respecter ses principes républicains. Tout comme quand il oppose la « pudeur » de la femme musulmane, à l’ « extravagance » de la femme occidentale … la pudeur est ici synonyme de voile et non de décence vestimentaire inscrite dans la loi républicaine. Et n’oublions pas les mouvements indigénistes et racialistes qui, ayant apporté des États-Unis le « sectionnalisme », substituent à la conscience de classe celle des identités : ils font l’apologie du racisme anti-blanc par une inversion du stigmate ! Et font de l’entrisme dans les établissements scolaires à travers le syndicat Sud 93 etc. …

Nous devons relever ce défi de la lutte contre le communautarisme destructeur de l’unité nationale. Il faut bien distinguer la liberté d’organisation des communautés (dans des espaces culturels, cultuels et de loisir) du séparatisme prôné par  les tenants du différentialisme confessionnel et ethnique, lequel est porteur d’exclusion et de tensions sociales. Les pouvoirs publics doivent protéger les citoyens de toute tentative d’imposition d’une idéologie liberticide comme celle de l’islamisme, idéologie contraire aux principes fondateurs de la République. Méfions-nous des discours qui usent de concepts familiers mais détournés dans leur usage, il y a la vitrine et l’arrière cours … Les islamistes, adeptes des  vieilles stratégies totalitaires, ne font pas ce qu’ils disent et ils ne disent pas ce qu’ils font.

____________________________________________________________________________

1- Berengère Bonte, La république française du Qatar, petits arrangements et grandes compromissions, Fayard, 2017

2- Florence Bergeaud Blackler, Le marché hallal, l’invention d’une tradition », Seuil, 2017

3- Haoues Seniguer, Petit précis d’islamisme – Des hommes, des textes, et des idées, L’Harmattan, 2013

4- Isabelle Lasserre, « Comment les réseaux turcs s’insinuent dans l’islam de France », Le Figaro, 28 septembre 2018, URL : http://plus.lefigaro.fr/page/isabelle-lasserre/

5- Marwan Mohammed. Militant associatif français d’origine égypto-algérienne et ancien trader à la société générale, qu’il a quitté pour des raisons éthiques. Il a rejoint, en 2009, le collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), dont il est devenu porte-parole et directeur exécutif depuis l’été 2016. Il intervient dans les médias anglo-saxons : la BBC, la chaîne qatari Al Jazeera et d’autres chaines arabophones. Disciple de Tariq Ramadan, il est considéré aujourd’hui comme son successeur légitime, en tant que porte parole du message des Frères musulmans. Il n’hésite à affirmer la supériorité de son islamité sur sa citoyenneté française. Il est l’auteur de deux  ouvrages : Foul express, petit traité de déconstruction du système financier, Les sentinelles, 2009 et Nous (aussi) sommes la Nation, La découverte, 2017.